mercredi 24 octobre 2012

[Livre] "Le troisième enfant" de Mehdi Omaïs



"Le troisième enfant" de Mehdi Omaïs 

Editions Alphée

En quelques mots : Dans un aéroport Sylvie vient de rencontrer Ali. D’un regard, elle sait que le moment est important. Elle fait alors le choix de suivre son instinct et de dire oui à cet homme qui la demande en mariage alors qu'il ne se connaisse pas. Elle vient de dire oui à son destin et à celui de son futur enfant... 


  • en 2 mots : destin & secret
  • en 1 question : Est ce que l'on provoque son malheur ou est-il inscrit en nous?


Paru en 2008, "Le Troisième enfant" est 2ème roman de Mehdi Omaïs et le 4ème roman que je découvre. Je n’ai finalement lu aucun de ses livres dans le sens de parution...

"Le Troisième enfant" est assurément son roman le plus sombre et le plus déroutant, mais aussi le plus rythmé où les destins se rencontrent et s’entremêlent autour d'un personnage principal : Sylvie.
Découpé en 3 partie, l'auteur au départ, pique notre curiosité et nous déroute avec des chapitres assez court où s'alternent passé, présent et futur de plusieurs personnages. Malin car sans être jamais pesant le suspens et le mystère sont bien présent et l'on avance assez vite dans l'histoire, où les rebondissements amènent chacun une vraie valeur ajoutée au récit jusqu'au tout dernier chapitre. Je n'ai vraiment pas vu venir les 20 dernières pages...

Je découvre ici les touches de l'auteur qui m'ont déjà plus dans ses autres romans, les liens du sang, les liens du coeur, le déracinement, les évocations du Liban et du Sénégal et toujours quelques références cinéphiles et musicales... Toujours présent également les petites touches de mots soutenus et un peu plus crus. Comme si la réalité devait prendre un peu de plus de force soulignée par ses mots qui percutent la lecture... L'ouverture du livre est d'ailleurs assez fort où l'on rencontre le premier personnage et qui évoque rapidement la drogue, le sexe et la mort... Dans un tout premier chapitre et quelques pages à peine...

Puis l'on délaisse assez vite ce premier personnage pour rencontrer Sylvie qui est avec Ali à une fête de famille et qui se souvient de sa rencontre avec Ali dans un aéroport... D'un regard, elle a su, d'un regard elle sait qu’il est cabossé. Elle sent le moment important pour elle et son destin...

Non, non je n'irai pas plus loin dans l'évocation de l'histoire et de ses personnages auxquels l'on s'attache très vite mais cela illustre assez bien le rythme imposé tout le long du livre où l'on se demande à chaque fin de chapitre et début du suivant où va nous mener l'auteur. L’alternance est bien dosée, créant de l’attente, du suspens mais toujours sans une trop grande frustration. "Le Troisième enfant" est définitivement son roman le plus rythmé où les rebondissements ont vraiment été surprenants et inattendus, donnant une nouvelle impulsion à l'histoire à chaque fois, jusqu'aux toutes dernières pages !
Astucieux et savoureux, mais jetant une ombre particulière au récit...

Un livre qui parle des rencontres, des choix, des liens familiaux, de la parentalité, des choix, de la maladie, de la guerre, du destin... Un livre qui évoque tout autant, l'air de rien, le pouvoir des mots par l'histoire qui de dévoile de page en page par les mots échangés entre les personnages eux-même mais aussi par la faculté des mots incrustés sur la page à  nous embarquer rapidement dans la vie de Sylvie... Des mots à la fois délicats, subtils et forts au service de ces destins qui se font de plus en plus fragiles...

Je me surprend ici à noter que les prénoms choisis sont assez "vieillots" Sylvie, Martine, Boris, Arthur, Pierre... Je me suis d'ailleurs toujours demandé comment un auteur déterminait les prénoms de ses personnages... Mystère...

En parlant personnage, ils se révèlent tous lentement avec chacun une petit touche de mystère, une part secrète, une face cachée... Assez peu décrit voir pas du tout physiquement pour certains, l'imaginaire a ici toute sa place. Un personnage m'a vraiment touché et tiré le sourire et je regrette qu'il n'ai pas été plus présent. Il est la toute petite éclaircie dans ce roman qui reste bien sombre... Je parle ici du personnage de Wolfgang qui n'utilise pas les bons mots au bon moment... Vous m'en direz des nouvelles :)

Un roman parsemé de bonnes idées et qui offre à nouveau comme dans ses précédents romans, des clins d'oeils plein de sens comme ici lorsque Sylvie enferme dans une bouteille l'air du Liban pour emmener un bout du pays "un souvenir éternel"... moi qui ramasse toujours un petit caillou dans les pays que je traverse, pensez comme cela me parle...

219 pages qui défilent donc à toute vitesse, une lecture dynamique et fluide mais une histoire bien sombre empreinte d'une question : "est ce que le malheur appelle le malheur?". "est ce que le destin malheureux est la loi du karma?", et si l'espoir du changement n'était pas juste une question de choix?

A noter d'ailleurs l'évocation du livre "Le prophète" de Khalil Gibran qui aborde des questions universelles sur le thème de l'amour et qui y répond par des métaphores pleine de sens et que j'ai bien envie de découvrir rapidement...
"Le troisième enfant" est un livre qui ne peut laisser indifférent, le destin de Sylvie et du personnage qu'est Pierre pousse à la réflexion... Pousse à réfléchir sur l'impact de nos actes, à l'effet papillon que cela peut provoquer, à l'effet boomerang du karma, à la seconde chance...

Un très bon livre auquel on s'attache malgré une morale et une histoire profondément triste... 

7/10

En bref : Un roman inattendu. De loin le livre le plus sombre et le plus dur avec une histoire bien rythmée aux multiples rebondissements où les personnages demeurent touchants et attachants malgré leurs noirceurs. Un roman marqué par le malheur, par les cycles de vie et l'empreinte des générations...


Morceaux choisis / Citation : 

" Devoir toujours courir après les choses. Après les gens. Après le bonheur. Après la vie. En étant toujours en retard."

" Elle sourit en cédant aux larmes leur liberté "

"Et ils marchèrent ensemble dans le silence des souvenirs. »
" Face à cette fenêtre, ils restèrent une bonne heure. Tous les deux. Seuls. "

" Là où l’enfer à balafré sa vie "

"ça fait longtemps que je n’ai rien de prévu. " 





Mehdi Omaïs est aussi journaliste ciné : http://www.lescinevores.com


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire