«Boomerang»
de Tatiana de Rosnay
Chez Livre de Poche
En
quelques mots : Antoine a eu l'idée de fêter les quarante ans de sa soeur en tête à tête sur le lieu de leurs dernières vacances heureuses... Elle avait 6 ans, c'était l'été 1973. Lors de leur retour, au moment où elle lui annonce qu'elle a quelque chose à lui dire, c'est l'accident. Antoine se retrouve en salle d'attente et fait le bilan de sa vie. Quitté par sa femme, ses enfants ados qui lui échappent peu à peu, un père tyrannique et envahissant et maintenant une sœur en salle de soin... Il faut parfois descendre bien bas pour remonter. Tel un boomerang...
- En deux mots : secret & mémoire
- En une question : le secret ronge celui qui le porte ou son entourage?
SPOILERS
MI NIMIM
"Boomerang" de Tatiana de Rosnay s'est imposé à moi car 1) j'aime beaucoup cette auteure et 2) son adaptation est annoncée, donc forcément j'ai décidé de le lire au plus vite et je ne suis vraiment pas déçue et encore une fois je suis sous le charme de son personnage principal : Antoine. (Il sera interprété par un acteur que j'aime beaucoup en plus : Laurent Lafitte).
Antoine décide pour fêter les quarante ans de sa sœur Mélanie de lui faire la surprise de partir à Noirmoutier, lieu de leurs dernières vacances en famille. Elle avait 6 ans, lui un peu plus. Au cours de ce week-end les souvenirs remontent et Mélanie sur la route du retour lui annonce qu'elle doit lui avouer quelques choses. Mais à ce moment là, elle perd le contrôle du véhicule et c'est l'accident. Antoine va alors devoir faire face à un enchainement d'événements, de révélations et de rencontre qui marqueront des changements profonds dans sa vie. Remarquable d'ailleurs la façon dont les choses sont amenés subtilement par petite touche, l'auteure nous laisse le temps de faire nous même le chemin de la réflexion et pourtant on ne devine vraiment pas ce qui nous attend...
Ce que je retiens le plus de ce roman c'est l'incroyable capacité de Tatiana de Rosnay de restituer les émotions que ressent son personnage principal. On pourrait presque sentir les odeurs de ses souvenirs de vacances. Au point tel que je me dis immédiatement que la nostalgie est forcément vrai et sincère. Est ce que ce sont des souvenirs personnels qu'elle partage avec nous? En tout cas cela m'a souvent renvoyé à mes propres souvenirs de vacances... Je me suis donc souvent perdue dans mes pensées...Les souvenirs d'Antoine ont une force incroyable et puis ce qu'il traverse au fil des pages nous font l'aimer malgré ses faiblesses.
Sans trop dévoiler de l'histoire, on fait ici face aux secrets de famille et des non dits, aux relations entre parents et enfants, aux surprises bonnes ou mauvaises que la vie nous réserve. Aux choix que l'on doit faire et l'importance de se dire les choses.
Les personnages qui entourent Antoine sont remarquables. A commencer par Angèle (tel un ange) thanatopracteuse qui prend soin des morts. Belle, sensuelle, spontanée. Je suis bouleversée par ses explications et me font comprendre un peu plus ce métier. Son histoire est vraiment émouvante.
Les liens d'Antoine avec ses enfants sont aussi bouleversants. Entre maladresses et non-dits, mais la présence et la constance d'Antoine le rendent touchant et délicat... Oui, oui je l'ai déjà dit, mais je suis sous le charme...
Antoine se bat pour sa vie, au sens propre comme au figuré, ceux qui l'entoure et ce que sa vie doit et va devenir. Finalement au pied du mur, très loin de sa routine habituelle, une fois qu'il a tout perdu, il remonte doucement à la vie. Il répond à des questions, fait des choix, va de l'avant et se découvre finalement lui même..
Et puis ce que j'aime chez Tatiana de Rosnay c'est qu'elle fait parfaitement le tour de l'histoire, que tout est complet que ce que l'on souhaite savoir arrive toujours quelques pages plus loin. Elle amène doucement l'intrigue mais n'oublie rien. Et puis le rythme est doux mais haletant, les faits s'enchainent, ils sont tantôt doux, tantôt originaux, durs ou insolites. Je n'oublie pas non plus la justesse des mots qui provoque parfois des sourires mais aussi parfois des larmes (Pauline).
Les métaphores sont toujours subtiles, le métier d'Antoine, architecte que l'on peut comparer à la construction de ce qu'il est. Celui d'Angèle qui rencontre Antoine au moment où il est comme mort de l'intérieur, les liens avec ses enfants et son père...C'est tout le problème de ce livre on veut donner envie de le lire et en même temps il ne faut pas trop en dévoiler pour en garder sa saveur. Je vais donc m'arrêter là et juste dire que lire "Boomerang" c'est alterner suspens, comédie, drame et émotions à multiple niveau.
Antoine Rey va me manquer vivement la sortie ciné !
En
bref : Un roman écrit par une femme où le héros est un homme et où les femmes
sont les plus fortes. Toujours au delà des apparences. Valse des sentiments et des "et si". Un roman plein d'espoir d'un meilleur et de sentiments qui reviennent comme un boomerang.
Morceaux
choisis / Citations :
"De cela aussi, il se souvenait. La joie de cette promenade vers la plage, la lenteur frustrante du pas des adultes."
"Chaque nuit, je partageais le lit de celle qui serait bientôt mon ex-femme, je la contemplais dans son sommeil et pleurais sans bruit. Elle ne cessait de me chuchoter, comme une mère patiente avec un enfant récalcitrant : "Antoine c'est juste que je t'aime plus comme avant"., puis elle me prenait très maternellement dans ses bras alors que moi je frissonnais de désir pour elle."
"Une image qui pèse sur moi de tout son épouvantable poids."
"-C'est parfois plus facile de ne pas savoir. La vérité peut faire mal."
"Je regarde mes chaussures. Des mocassins de cuir. Mes chaussures banales. ET pourtant, ces pompes qui n'ont l'air de rien m'ont porté à la morgue de l'hôpital devant le corps de Pauline. Puis à l'appartement de Mélanie. Et à présent ici, dans ce commissariat, au milieu de la nuit, pour venir chercher mon fils ivre mort."
"-Que les étoiles se retirent, qu'on les balaye ;
Démontez la lune, et le soleil ;
Videz l'océan, arrachez la forêt ;
Car rien de bon ne peut advenir désormais."
"On préfère le silence. La torpeur et le chloroforme du silence. Le silence de plomb coulant sur tout comme une étouffante et fatale avalanche."
"(...) cette femme extraordinaire dont la mort est le quotidien vient de m'offrir le baiser de la vie."
Un joli billet qui donne sacrément envie...
RépondreSupprimerMerci ! :) Et oui je le conseille vivement !
RépondreSupprimer